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MOBILITE ET SECURITE ROUTIERE (JUIN 2007)
A. Politique européenne des transports: de nouvelles perspectives. B. Traduction de la politique européeenne des transports en Belgique.
A. POLITIQUE EUROPEENNE DES TRANSPORTS : DE NOUVELLES PERSPECTIVES
La Commission européenne a tracé en juin 2006 les nouveaux contours de la politique européenne du transport en publiant son 'Examen à mi-parcours du livre blanc sur les transports publié en 2001'. Cette publication était intitulée 'Pour une Europe en mouvement – Mobilité durable pour notre continent '. Elle marque un changement de cap de la vision européenne du transport. La Belgique suivra-t-elle dans cette nouvelle voie ?
L’industrie automobile accueille favorablement la publication : il
s’agit d’une première étape importante
vers une
politique des transports plus réaliste et plus compétitive
pour l’Europe. À vrai dire, ce changement de cap ne survient pas
trop tôt. Le livre blanc publié en 2001 porte certes ses fruits
en matière de transport aérien et maritime,
mais la politique a été moins positive pour le transport
terrestre, en particulier pour le transport routier. Des concepts tels que ceux
de 'transfert modal' et de 'dissociation' entre la croissance
du transport et la croissance économique ont dominé la politique
des transports pendant cinq ans mais semblaient difficilement réalisables.
À cet égard,
l’examen à mi-parcours reflète
davantage de
réalisme : le transport y est en effet reconnu comme un
levier d’une croissance et d’une compétitivité plus
durables pour l’économie européenne, comme les définit
la
stratégie de Lisbonne. Ceci doit également mener à un
transport routier plus efficace qui permettra de répondre
à la plupart des besoins de transport des entreprises et des
personnes au sein de l’Union européenne.
Du 'transfert modal' à la 'co-modalité'
L’analyse sur les prévisions de croissance des transports témoigne également d’un grand sens des réalités.
La compréhension du fait que ni la 'dissociation' ni le 'transfert
modal' vers le rail n’auront lieu au cours des prochaines
années a mené à l’introduction d’un nouveau
concept
dans la politique des transports : celui de la 'co-modalité'.
La co-modalité cherche à évaluer les forces et les
faiblesses de chaque type de transport, à tirer le meilleur parti
de chaque mode de transport et à investir dans des projets
intermodaux pour lesquels il existe une réelle demande du
marché. Ce 'changement de politique' contribuera à tous
égards davantage à l’objectif principal que se fixe l’examen
à mi-parcours : parvenir à une politique des transports
durable offrant une réponse aux besoins économiques,
sociaux et environnementaux de l’Europe. La mobilité
des marchandises et des personnes est un élément essentiel de cet objectif et elle doit être optimalisée, également en ce qui concerne la mobilité routière.
La croissance future des transports exige
des investissements massifs
Les investissements d’infrastructure conservent une importance essentielle. En effet, une grande partie de la croissance des transports à venir d’ici 2020 (50 % pour le transport
des marchandises et 35 % pour le transport des personnes)
devra encore être prise en charge par la route, même si les
chemins de fer et la navigation fluviale réussissent à doubler leurs capacités. Par conséquent, des investissements
doivent suivre cette demande. Entre-temps, l’industrie automobile n’est
pas en reste, bien au contraire.
STI : levier vers un système de transport
plus efficace
Convaincues que les systèmes de transport intelligents
(STI) recèlent un potentiel important en matière de
gestion du trafic et de lutte contre la congestion, les marques automobiles disposent de nombreux projets communs sur les STI. Toutefois, une collaboration avec des
partenaires institutionnels et privés est hautement nécessaire afin de contribuer à soutenir et accélérer le
développement et l’introduction des STI. Il s’agit concrètement
de systèmes d’information sur le trafic et la navigation,
de détection automatique des incidents de la circulation, de
réglage des feux de signalisation et de gestion dynamique
de la vitesse, du stationnement,... en bref, de systèmes
destinés à créer et préserver la fluidité de
la circulation.
Internalisation des coûts externes : de
l’opportunité d’un grand débat sur le fond
Par ailleurs, les STI offrent également des possibilités
pour l’introduction d’un système intelligent de tarification de l’usage de l’infrastructure dans l’Union européenne. Ceci exige d’abord un débat de fond sur les
bases, les principes et le domaine d’application d’une
tarification intelligente de l’infrastructure. L’industrie
automobile demande à ce sujet de pouvoir organiser
un round d’analyse approfondie et de consultation. Un
point crucial est la question de la définition et du calcul
de l’internalisation des coûts externes de tous les modes
de transport. La Commission européenne doit présenter
à ce sujet une proposition le 10 juin 2008 au plus tard.
L’industrie automobile reconnaît déjà que les transports
ferroviaires, aériens et par voies navigables doivent être
impliqués dans ce processus, qu’un prix raisonnable
du transport est essentiel à la prospérité et au progrès
économiques et qu’il convient de veiller à ce que cette
internalisation ne porte pas atteinte à la compétitivité
de l’Europe.
B. TRADUCTION DE LA POLITIQUE EUROPEENNE DES TRANSPORTS EN BELGIQUE
En réalité, la 'co-modalité' est un concept
que FEBIAC
défend déjà depuis plusieurs années : parvenir à une
complémentarité accrue des modes de transport, dans
laquelle les faiblesses de l’un sont compensées par les
forces de l’autre. La co-modalité, au contraire du
transfert modal, laisse également à chaque mode
de transport la marge nécessaire pour pouvoir abattre
tous ses atouts, tant pour le transport des personnes
que pour celui des marchandises.
Co-modalité dans le transport des personnes
Toutes les évolutions indiquent que le transport individuel et la voiture en particulier restent une donnée
centrale du quotidien. Le taux d’équipement en voitures
et deux-roues croît de manière constante et assure la
mobilité de base d’un nombre croissant d’individus. Les
vélos et les scooters sont extrêmement bien adaptés aux
petites distances. La voiture est ensuite championne de
la combinaison des activités professionnelles et familiales
au sein d’un budget temps donné. Dans ce domaine, le
transport public, même gratuit, ne pourra jamais remplacer le transport individuel à un prix raisonnable. N’est-il
pas grand temps que la politique reconnaisse que les
usagers optent très souvent pour le transport individuel,
y consacrent un budget suffisant et ont par conséquent
droit à une infrastructure de circulation de qualité ?
Une mobilité durable est toutefois impossible sans les
transports publics. FEBIAC demande que le transport
public se consacre à ses domaines de force et de rentabilité : l’offre d’un transport collectif où et quand
la
demande de transport est élevée, c’est-à-dire dans
les
zone (péri-)urbaines et pendant les trajets de navette
entre le domicile et le lieu de travail.
Un RER accessible au transport individuel
Un projet important est en chantier au niveau fédéral : le
Réseau express régional de Bruxelles et ses environs,
qui doit être développé plus rapidement. Mais ce n’est
pas tout : la véritable faiblesse de ce RER réside dans
le transport antérieur et postérieur. Afin de convaincre un nombre maximal de navetteurs d’utiliser ce
réseau, les correspondances entre le transport individuel et le RER doivent être parfaites.
À cette fin, des parkings suffisants, gratuits, sécurisés
et faciles d’accès doivent être prévus à proximité des
gares pour les voitures et les deux-roues. Ceci nécessite
également :
- une signalisation claire et opportune dès les zones
d’encombrement ;
- des informations fiables sur le nombre d’emplacements de parking libres et sur le temps de trajet en
transport public jusqu’à la destination finale ;
- de la sécurité, du confort et de la multifonctionnalité. Sont visés ici la surveillance vidéo, la facilité
d’entrée et de sortie des parkings, des commerces et
d’autres équipements.
Le grand Ring de Bruxelles nécessite un
élan du fédéral
Le RER doit gérer les problèmes de circulation à
Bruxelles et dans ses environs mais ne constitue pas une
alternative à la circulation ininterrompue à laquelle la
capitale est confrontée. La congestion croissante du R0
a un effet de tâche d’huile sur le reste du réseau routier.
Toujours plus d’individus et d’entreprises se retrouvent
de plus en plus souvent à l’arrêt, cherchent des itinéraires
secondaires et parcourent donc encore davantage de
kilomètres ou traversent simplement Bruxelles.
Si Bruxelles veut en outre réduire la capacité de ses
grandes artères, l’impasse totale est proche. FEBIAC
appelle donc les régions à convenir rapidement d’une
approche pour le R0, une des deux artères de notre
économie. Cette approche nécessite à la fois le développement d’un centre de télématique et de trafic
transrégional et le réaménagement du R0 à proprement parler. FEBIAC voit ici un rôle important à jouer
pour le niveau fédéral afin d’initier et de coordonner
la réflexion entre les régions.
Co-modalité dans le transport de marchandises
La co-modalité est également applicable au transport
de marchandises.
La politique actuelle des transports
en Belgique mise encore sur le 'transfert modal' mais
ne tient par conséquent pas suffisamment compte
de la demande future en matière de transport de
marchandises. Notre infrastructure est davantage un
frein qu’un facteur adjuvant pour la préservation de la
compétitivité de nos entreprises et la réalisation de nos
ambitions de carrefour logistique au niveau européen.
Grâce à sa situation géographique, son infrastructure
portuaire et de transport et sa compétence logistique,
la Belgique reste un emplacement de choix pour les
investisseurs en Europe.
Nous devons continuer à en faire une opportunité
pour notre économie et dans ce cas, nos capacités de
transport doivent être développées en conséquence.
Pour cela, nous devons utiliser au maximum nos
capacités routières, ferroviaires et navigables et investir dans des projets d’intermodalité pour lesquels il
existe une réelle demande du marché.
Le lancement d’un essai des Ecocombis,
enfin ?
FEBIAC réitère l’appel lancé il y a deux ans pour
la
mise en place d’un projet pilote en Belgique pour les
Ecocombis, sur le modèle des Pays-Bas.
Le dossier des Ecocombis dépasse du reste largement le
concept de géants des routes de 25 mètres. Leur structure modulaire leur permet de s’intégrer parfaitement
dans un concept de transport intégral. L’Ecocombi se
compose de 3 éléments : un camion classique, une
semi-remorque et une remorque. Les modules peuvent être combinés de différentes manières selon les
fonctions qu’ils remplissent et les types de routes qu’ils
doivent parcourir.
L’Ecocombi peut être désassemblé pour devenir un
petit camion de distribution dans le trafic urbain et
local, un camion classique dans le trafic interurbain
et régional et un ensemble de 25 mètres dans le trafic
national et international. En outre, les unités de chargement peuvent être aisément chargées sur un train
ou un bateau pour un transport de longue distance.
Les différentes possibilités de transbordement entre
petits véhicules, poids lourds, trains et bateaux sont
optimales au niveau de carrefours intermodaux.
De nombreuses organisations ont déposé au cours des
derniers mois des propositions et des projets auprès de
nos pouvoirs publics, mais l’Ecocombi reste dans notre
pays un dossier tabou. Cette situation est incompréhensible, d’autant que les Pays-Bas établissent maintenant
que les Ecocombis ne sont pas plus dangereux, qu’ils
sont beaucoup plus écologiques et qu’ils n’allongent
pas les encombrements mais au contraire les raccourcissent. De plus, ils permettent d’optimaliser essentiellement des capacités existantes de transport sur route
qui ne pourraient pas être remplacées par le chemin de
fer ou la navigation intérieure.
3x plus d’investissements pour un réseau
routier qualitatif et productif
Non seulement l’accessibilité de la Belgique diminue,
mais notre pays enregistre également des résultats
médiocres en matière de sécurité routière.
Cette situation est en grande partie liée au manque de qualité,
d’uniformité et de lisibilité de notre infrastructure
routière. D’année en année,
le retard de notre pays par rapport aux meilleurs élèves européens
s’accroît
car notre
pays consacre trop peu de moyens à la modernisation et
la sécurisation de l’infrastructure routière. Les Pays-Bas,
qui affichent quant à eux de bons résultats, investissent
chaque année 6 milliards d’euros, soit 4 fois plus. Si nous
voulons atteindre les objectifs en matière de sécurité
routière, optimaliser les capacités de notre réseau routier
et simultanément réaliser les ambitions logistiques de
notre pays, nous devons multiplier par trois les budgets
alloués à l’infrastructure des transports. Étant
donné que
certains projets relèvent d’un intérêt national,
un rôle
de coordination revient au niveau fédéral, en particulier
pour les projets qui dépassent les frontières régionales
et
nécessitent une collaboration entre les régions.
Analyse des accidents et de la mobilité :
mesurer, c’est savoir
La politique des transports en Belgique nécessite des
chiffres fiables et des recherches sur le comportement
de la population en matière de déplacements, de
transport et de circulation. La dernière enquête de
mobilité réalisée au niveau de la Belgique date d’il
y
a 10 ans... La publication de statistiques belges sur le
transport et la circulation se fait également attendre
depuis des années. Il faut beaucoup trop de temps
pour identifier les problèmes de mobilité et (re-)diriger la
politique des transports sur cette base.
Le recensement et l’analyse des facteurs d’accidents
sont également essentiels pour pouvoir mener une
politique de sécurité routière. Les accidents de la route
sont provoqués par des concours de circonstances,
dans lesquels tant le facteur humain que le véhicule
et l’infrastructure contribuent dans des mesures différentes au
déclenchement, à l’ampleur ou à la
gravité
de l’accident. Ici aussi, des recherches scientifiques en
matière de sécurité routière ne peuvent que bénéficier
aux fondements, à la (re-)direction et à la crédibilité de
la politique des transports.
FEBIAC plaide dès lors en faveur de la création d’un
institut indépendant de support stratégique pour la
mobilité et l’accidentologie, qui poursuivrait d’une
part les recherches déjà réalisées et en cours
et pourrait d’autre part lancer de nouvelles recherches sur
les matières qui n’ont pas encore été étudiées
dans le
domaine de la mobilité et de la sécurité routière.
En résumé, FEBIAC demande au nouveau gouvernement fédéral
:
- de développer une approche de la mobilité pour
la Belgique qui pose la 'co-modalité' comme
point central d’une recherche de solution aux
problèmes de mobilité et de la définition de notre
pays comme un carrefour logistique en Europe;
- de coordonner des projets de mobilité d’intérêt
national et de chercher à harmoniser à cette
fin les budgets d’investissement régionaux;
- d’initier et de coordonner une réflexion régionale afin de prendre en charge les problèmes
relatifs au grand Ring de Bruxelles;
- de développer plus rapidement le Réseau
express régional (RER) dans Bruxelles et ses
environs;
- de prévoir pour tous les arrêts du RER des possibilités de parking suffisantes, confortables et
sécurisées pour les voitures et les deux-roues;
- de permettre le lancement d’un projet pilote
sur les Ecocombis;
- de créer un institut scientifique de support
stratégique pour l’accidentologie et la mobilité
chargé d’identifier et d’analyser les facteurs
d’accidents et les problèmes de mobilité en
Belgique