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LA TAXATION DES VOITURES DANS L'UNION EUROPEENNE

La Commission européenne a présenté le 9 septembre dernier une stratégie globale de taxation des voitures particulières dans l'Union européenne. Elle analyse tout d'abord les régimes fiscaux actuellement appliqués aux voitures particulières en explorant les moyens d'améliorer leur coordination. Ceci dans le but de supprimer les entraves fiscales à la libre circulation de ces véhicules au sein du marché intérieur et les distorsions qui en résultent.

La taxe d'immatriculation (TI)

  • Dix Etats membres perçoivent actuellement une TI;
  • L'assiette et le niveau des taxes applicables actuellement varient considérablement d'un Etat membre à l'autre : de 0 à 180% du prix hors taxe de la voiture;
  • La TI est au centre de la plupart des plaintes des citoyens européens, ces derniers contestant notamment le caractère disproportionné des taux appliqués ou le double paiement de la taxe;
  • Les écarts significatifs existant entre les niveaux de TI appliqués déterminent en partie le prix hors taxes des voitures. Ceci incite à l'achat de véhicules dans les États membres appliquant une TI élevée, puisque le prix hors taxe pratiqué dans ces Etats est en général plus faible;
  • Les Etats membres disposant d'une importante industrie automobile ont tendance à ne pas prélever de TI ou à appliquer une TI assez faible, alors que les Etats membres qui importent des voitures ont tendance à appliquer des TI plus élevées.

La Commission préconise de réduire progressivement, voire d'abolir la TI, et de la remplacer par une taxe annuelle de circulation et une taxe sur les carburants (de façon que la charge fiscale reste inchangée mais qu'elle soit liée à l'utilisation d'une voiture plutôt qu'à son acquisition).

Les principales raisons avancées sont les suivantes :

  • plus grande stabilité fiscale pour le budget : la taxe de circulation annuelle est une recette fiscale plus stable que la TI (puisque celle-ci dépend des ventes annuelles);
  • favoriserait un rapprochement des prix pour les particuliers dans l'UE;
  • se traduirait par un rapprochement plus important des taxes automobiles dans l'UE;
  • favoriserait un meilleur fonctionnement du marché intérieur et un accroissement de la compétitivité de l'industrie automobile européenne au bénéfice des citoyens.

Commentaire de FEBIAC
L'abolition de la taxe de mise en circulation (TMC) et son intégration dans la taxe de circulation annuelle (à recettes totales inchangées) est depuis l'instauration de cette taxe un des chevaux de bataille de FEBIAC. Outre la stabilité fiscale
pour le budget, cette mesure combattrait l'encouragement à l'achat de voitures plus anciennes (la TMC étant dégressive dans le temps) et concourrait à réaliser de surplus l'objectif environnemental recherché (voir infra).

La taxe annuelle de circulation (TAC)

A l'exception de la France, tous les États membres perçoivent une TAC au niveau national. Les facteurs objectifs utilisés pour déterminer l'assiette de la taxe sont très divers (cylindrée, puissance en kW, niveaux d'émissions EURO et CO2, masse du véhicule). S'agissant des montants proprement dits, des TAC moyennes élevées ont été constatées, par exemple, au Danemark, aux Pays-Bas et en Irlande. Dans la plupart des États membres, la TAC perçue pour les voitures diesel est supérieure à celles perçue pour les voitures essence comparables, principalement en vue de compenser une fiscalité plus faible sur le diesel.

Selon la Commission, des mesures doivent être prises en vue d'assurer un certain degré de convergence entre les États membres et particulièrement en matière d'assiette de la taxe. La restructuration de l'assiette devrait établir un lien plus
direct entre le niveau d'imposition et les émissions de CO2. Tant la TI que la TAC doivent être transformées en taxes entièrement calculées sur base des émissions de CO2 ou, à tout le moins, comporter un nouvel élément CO2.

Commentaire de FEBIAC
Depuis plusieurs années, FEBIAC plaide pour la suppression de la TMC et son intégration dans la taxe de circulation annuelle. L'utilisation de critères plus pertinents que la cylindrée, à savoir,la puissance réelle en kW et la conformité aux normes d'émissions EURO ont fait l'objet de propositions concrètes. Sans résultat! Si le CO2 sera, dans l'avenir, la préoccupation principale en matière d'émissions (étant donné que les autres polluants – HC, NOx, CO – auront atteint, grâce aux normes EURO, un niveau extrêmement bas), il n'en reste pas moins qu'à moyen terme, la priorité serait de faire disparaître du parc les véhicules ne répondant même pas à la norme EURO 1 (avant 1/1/1993), soit 30% du parc des voitures. Une modulation – évolutive dans le temps de la taxe de circulation en fonction de ces normes EURO nous paraît à cet effet la meilleure solution.


La taxe sur la valeur ajoutée (TVA)

La TVA est régie par un système communautaire qui, dans le cas des voitures neuves, impose un degré d'harmonisation considérable. Le taux de TVA applicable aux véhicules à moteur est généralement le taux normal. Il varie de 15% (Luxembourg) à 25% (Suède et Danemark). Après l'achèvement du marché intérieur en 1993, les États membres,qui avaient auparavant appliqué un taux de TVA sur les produits de luxe et/ou des droits d'accises aux voitures, ont modifié leur régime de taxation en remplaçant ces taxes par des taxes d'immatriculation.

Par ailleurs, étant donné les écarts entre les taux de TVA appliqués dans les différents États membres, il est devenu évident que ces derniers tenaient à ce que la TVA sur tous les moyens de transport soit perçue sur le territoire où résidait le propriétaire du véhicule et aux taux applicables dans le pays correspondant. Cette situation, qui contraste avec les règles générales applicables aux autres biens de consommation achetés dans le marché intérieur et qui ne favorise pas la convergence des régimes de TVA applicables aux voitures, résulte de l'absence de rapprochement des taux de TVA.

Commentaire de FEBIAC
Une réforme du système actuel de TVA applicable aux voitures n'est clairement envisageable que dans un contexte de TVA harmonisée (pas plus de 1 à 2% de différence de taux entre États membres).

Cet objectif semble encore lointain étant donné les énormes incidences budgétaires sur les finances nationales. Si l'harmonisation de la TVA semble être un préalable à la réforme proposée par la Commission, elle n'est en elle-même pas neutre. Une harmonisation complète de l'assiette et des taux dans tous les pays de l'Union européenne représente un choc
important, par nature asymétrique. Harmoniser les taux de TVA est une entreprise lourde qui demandera sans doute une longue négociation. Globalement, pour l'ensemble de la Communauté, la production est modifiée : l'alignement vers le haut a un effet récessif, l'alignement vers le bas un effet expansionniste. Dans la plupart des pays de l'Union, une harmonisation de la TVA, quel que soit le niveau adopté, aurait des conséquences suffisamment importantes pour imposer des modifications non négligeables du reste de la fiscalité.

Les taxes sur les carburants
Les droits d'accises sur les carburants sont considérés comme un instrument fiscal efficace pour collecter des recettes, influencer le niveau d'utilisation des véhicules (!) ou internaliser les coûts environnementaux et sociaux liés à l'utilisation des voitures particulières, tels que les coûts d'infrastructure, les coûts imputables aux accidents et les coûts résultant de la pollution atmosphérique. En tenant compte de la relation directe entre la consommation et les émissions de CO2, les droits d'accises sont un instrument efficient pour internaliser le coût externe des émissions.

Habituellement, les États membres qui appliquent une TI réduite, voire nulle, compensent les pertes de recettes correspondantes en taxant plus lourdement les carburants. A la seule exception du Royaume-Uni, ils imposent plus faiblement le diesel, qui est traditionnellement utilisé par les véhicules utilitaires. En moyenne, le diesel est taxé environ 140 € /1.000 litres de moins que l'essence sans plomb. Cette différence de taxation entre le diesel et l'essence ne se justifierait plus si la taxation du carburant diesel à usage commercial était découplée de celle du diesel à usage privé. Par le passé, la Commission a déjà recommandé l'alignement progressif des droits d'accises applicables au carburant diesel sur les droits applicables à l'essence sans plomb (proposition du Conseil COMM 2002 410 final). Un tel rapprochement permettrait de réduire les distorsions liées à la fiscalité et serait cohérent d'un point de vue environnemental. En dépit d'un bilan plus positif que pour l'essence en termes d'émissions de CO2, la combustion du diesel entraîne d'autres problèmes pour l'environnement (émissions de particules ou de dioxyde d'azote). Cependant, on peut s'attendre à ce que ces différences entre les moteurs diesel et essence des voitures disparaissent dans les années à venir. Compte tenu de l'ensemble de ces éléments, il n'y a, au premier abord, aucun motif environnemental d'appliquer des fiscalités différentes à ces carburants.

Commentaire de FEBIAC
Si, a priori, il n'existe pour la Commission aucune raison environnementale d'appliquer des taux d'accises différenciés, il n'en reste pas moins qu'à l'heure actuelle la moindre pollution – en termes de CO2 - des véhicules diesel est indiscutable. Il convient également de noter qu'une augmentation des accises devrait être accompagnée d'une baisse comparable des taxes de circulation – plus élevées - applicables aux voitures diesel. Par ailleurs, les conséquences économiques d'un relèvement des accises sur le diesel – non harmonisé au niveau européen – pourraient revêtir un caractère catastrophique pour les sociétés de transport nationales et internationales. FEBIAC émet donc les plus grandes réserves quant à une modification 'sauvage' des taux d'accises actuels.

Taxation des voitures de société

Les voitures de société représentent une part importante des voitures particulières neuves vendues chaque année (entre 35% et 45% du total des ventes enregistrées sur les principaux marchés de l'UE).

D'après la Commission ces voitures :

  • ont tendance à être 8 à 10% plus grandes et plus puissantes que la moyenne du parc automobile national et par conséquent plus polluantes en termes de CO2;
  • ont, en principe, un kilométrage annuel plus important que la moyenne du parc et contribuent davantage au volume total de trafic, aux émissions polluantes et à la consommation moyenne du parc;
  • sont moins sensibles aux fluctuations des prix de détail que les voitures particulières privées.

Bien que les régimes des voitures de société soient sensiblement différents d'un Etat membre à l'autre, ils se caractérisent généralement comme suit :

  • des règles d'imposition des sociétés permettent de déduire des bénéfices imposables les dépenses afférentes à l'achat/au leasing des voitures de société ainsi qu'à leurs frais d'exploitation;
  • le salarié qui dispose d'une voiture de société est tenu de payer des impôts sur le revenu. En règle générale, la mise à disposition d'une voiture de société est considérée comme un 'avantage en nature' dont la valeur est ajoutée aux revenus personnels de l'employé et imposée conformément au régime fiscal national. Le montant annuel de l'avantage en nature correspond à un pourcentage, qui varie d'un État membre à l'autre, de la valeur d'achat de la voiture de société. Le taux appliqué oscille entre 9% (Suède) et 35% (Royaume-Uni) et est par exemple de 12% en Allemagne et de 25,5% en Irlande.

Plusieurs États membres ont récemment entrepris une révision de leur régime de taxation des voitures de société. Le Royaume-Uni appliquera quant à lui un régime en vertu duquel, l'impôt sur le revenu dont sera redevable l'employé sera en partie calculé sur base des émissions de CO2.

Selon la Commission, ceci pourrait constituer une expérience intéressante. Par ailleurs, la Commission encourage les sociétés à tenir compte des objectifs généraux de la politique des transports et de l'environnement lorsqu'elles mettent une voiture à disposition de leurs salariés à des fins professionnelles.

Commentaire de FEBIAC

Les voitures de société étant remplacées périodiquement (tous les 3 à 4 ans), leur âge est moins élevé que la moyenne du parc (7 ans et 6 mois), elles sont donc moins polluantes. Etant donné qu'elles sont presqu'exclusivement équipées de moteurs diesel, leurs émissions en CO2 par km sont elles aussi moins élevées (les émissions de CO2 par les voitures neuves diesel ont baissé de quelque 12% entre 1995 et 2001).

Par ailleurs, il ressort des résultats de l'enquête mobilité réalisée pour FEBIAC en octobre 2001, que la voiture de société est pour 98% des utilisateurs avant tout un outil de travail : plus de la moitié des personnes professionnellement actives l'utilisent quotidiennement pour rendre visite à des clients ou assister à des réunions. Une éventuelle augmentation de la taxe sur les voitures de société doit maintenir ce groupe totalement à l'écart. Sans quoi, la mesure ne fera qu'accroître la pression fiscale sur le travailleur et sur l'employeur et alimenter les caisses de l'Etat plutôt que réduire l'usage impropre 'des voitures de société et la circulation automobile.'

Conclusion générale
Dans ce cadre d'une utilisation plus responsable de la voiture, la variabilisation des coûts doit être le but ultime. La variabilisation totale, à savoir le transfert de toutes les taxes liées à l'achat (TI) et à la possession de la voiture (TAC), vers la taxation au kilomètre parcouru - via les carburants - n'est, dans le contexte actuel, pas concevable. Cependant, une réflexion doit être menée à l'échelle européenne, pour viser à une harmonisation sur ce plan également. Tout ceci dans un contexte budgétaire global neutre.

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