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VERIFICATION DU SYSTEME DE FREINAGE EN CHARGE
Tout le monde garde en mémoire les graves accidents de poids lourds qui se sont produits en 1997 et 1998. L'un d'eux s'est produit à Stavelot où un camion fortement chargé de produits inflammables s'est trouvé sans freins dans une descente à forte déclivité et a achevé sa course folle contre des habitations, faisant de nombreuses victimes.
Voulant éviter qu'un tel drame ne se reproduise, le législateur a jugé urgent d'améliorer le niveau de l'état technique des véhicules. La directive européenne 96/96/CE relative au contrôle technique des véhicules à moteur et de leurs remorques qui prévoit notamment un contrôle de l'efficacité du système de freinage en charge des véhicules fut ainsi transposée en droit belge par un arrêté royal du 15.12.1998.
La mise en pratique de ce contrôle, logique et apparemment simple à exécuter, pose cependant certains problèmes.
Devant fixer les modalités d'exécution de ce test qui devait entrer en vigueur
le 1er juillet 1999, l'Administration s'est rapidement trouvée devant la difficulté
de concilier les intérêts des différentes parties concernées (FEB, FEBETRA,
FEBIAC, FEDERAUTO, GOCA, SAV).
Proposition du Ministère des Communications
Sur base de l'étude comparative effectuée par le GOCA sur les différentes méthodes
employées dans les autres Etats membres et après consultation des transporteurs
et des constructeurs, l'Administration proposa de retenir essentiellement la
méthode dite par 'extrapolation à vide'. L'extrapolation faite à partir d'un
relevé de la pression mesurée dans le circuit de freinage et de la force de
freinage exercée sur un freinomètre à rouleau est comparée aux valeurs théoriques
données par le constructeur pour le type de véhicule. D'un point de vue strictement
technique, il s'avère cependant que le contrôle des freins d'un véhicule réellement
chargé constitue la méthode la plus fiable.
Mais la proposition du Ministère ne s'arrête pas là. Elle précise en outre
que la mise en œuvre efficace du test nécessite la présence de prises de pressions
regroupées à l'extérieur gauche des véhicules et placées à un endroit facilement
accessible pour effectuer les opérations depuis le plancher de travail ! Un
cahier des charges fixant les prescriptions pour le placement de ces prises
de pression et leur marquage a même été établi. Cette exigence a pour but d'éviter
que l'opérateur ne doive dans certains cas se glisser sous le véhicule. Elle
permet aussi que l'ensemble des opérations de contrôle (raccordement - mesure
- déconnexion) puissent se faire dans un laps de temps raisonnable pour ne pas
perturber le rythme de passage de l'ensemble des véhicules.
Selon la proposition du Ministère, ces prises de pression complémentaires seraient
obligatoires pour toute une série de véhicules qui ne peuvent être contrôlés
en charge réelle et ne peuvent bien évidemment pas être exemptés. Il s'agit
de véhicules tels que ceux destinés aux transports d'animaux vivants, de carcasses
d'animaux, d'arbres, d'ordures ménagères ainsi que des citernes ADR (matières
dangereuses). Les véhicules qui ne seraient pas équipés de ces prises de pression
complémentaires devraient quant à eux être présentés deux fois. L'une à vide
pour le contrôle périodique complet de base, et une seconde fois pour le contrôle
en charge.
Position de FEBIAC
FEBIAC et les constructeurs qu'elle représente n'ont pas d'objections à formuler
quant au choix de la méthode en elle-même, par contre ils ne peuvent en aucun
cas marquer leur accord pour le placement de prises de pression complémentaires.
Du point de vue technique, ces dispositions impliquent en effet l'adjonction
de tubes pouvant dans certains cas être très longs (jusqu'à près de 3m) ce qui
est de nature à modifier les prestations (temps de réponse) du système de freinage.
Par ailleurs, cet équipement pourrait entraîner des défectuosités et des dysfonctionnements
si son placement était mal effectué.
Juridiquement, les observations sont importantes :
- ces dispositions qui ont trait à la construction du véhicule sont plus contraignantes
que les dispositions de la Directive 71/320/CEE et du Règlement R13 ECE qui
imposent, dans l'optique d'un contrôle, que les prises d'essai de pression
soient placées en des points facilement accessibles et aussi proches que possible
de l'organe auquel elles se rapportent (cylindre de frein, réservoir d'air);
- cette exigence est contraire au processus d'harmonisation de la réglementation
technique des véhicules et ne peut être imposée par simple circulaire; elle
ne peut être officialisée que par arrêté royal à condition que la procédure
d'information dans le domaine des normes et réglementations techniques, prévue
par la Directive 98/34/CE, soit préalablement suivie à l'égard des autres
Etats membres;
- les dossiers d'homologation des véhicules devraient être adaptés pour y
décrire la modification du schéma du système de freinage, sans quoi les véhicules
ne seraient plus conformes aux données du dossier initial.
Les véhicules produits par les constructeurs sont donc conformes aux exigences
qui leur sont imposées et sont équipés des accessoires nécessaires et suffisants
pour la vérification de leur système de freinage. Pour FEBIAC, il appartient
à la structure de contrôle de s'équiper en conséquence et de prendre les dispositions
qui s'imposent pour s'acquitter de sa mission de contrôle.
Sur le plan pratique, FEBIAC fait observer aussi que les utilisateurs qui n'équiperaient
pas leurs véhicules de ces prises de pression complémentaires, seraient sanctionnés
alors que leurs véhicules sont bien en état d'être vérifiés. Les transporteurs
sont opposés à une situation qui leur imposerait alors de passer deux fois lors
de chaque inspection périodique; une première fois à vide et une seconde fois
en charge. Par ailleurs, comment contrôler la masse et la répartition du chargement
qui ne leur appartient généralement pas et qu'ils doivent normalement livrer
dans les meilleurs délais ! Et que faudra-t-il faire du chargement au cas où
les résultats de l'essai seraient négatifs ? Au terme de l'arrêté, un véhicule
qui recevrait un certificat à validité nulle doit effectuer le trajet de retour,
vers son siège d'exploitation ou vers le réparateur, à vide ! Ces problèmes
pourraient bien être résolus grâce à une méthode où la charge serait simulée
à l'aide de sangles exerçant une traction vers le bas sur les essieux. Mais,
le danger de cette méthode est le risque d'endommager les essieux si l'effort
est trop élevé ou exercé à un mauvais endroit.
Pour suivre, FEBIAC s'étonne aussi du fait qu'aucune disposition ne sera prise
semble-t-il pour l'application de certains autres points non moins importants
prévus par l'annexe 15 de l'arrêté : contrôle des garnitures de freins, des
tambours et disques de freins, des cylindres de frein, du correcteur automatique
de freinage,... Le contrôle des véhicules disposant d'un freinage électronique,
technologie qui va se généraliser dans un avenir proche, n'est pas non plus
traité par la proposition de l'ACI (Administration de la Circulation Routière
et de l'Infrastructure).
L'application stricte et complète des dispositions réglementaires, si elle
est dictée par un réel souci d'améliorer la sécurité routière, devrait donc
mener à un test qui s'intégrera difficilement dans l'organisation actuelle du
contrôle technique périodique. Complexe, ce contrôle demandera du temps et une
infrastructure adaptée.
Signalons aussi que ce sujet est régulièrement débattu au niveau international
par un groupe de travail chargé de définir la réglementation du contrôle technique
périodique. Regrettons que la Belgique, par manque de moyens humains ne puisse
y participer. L'Administration aurait la possibilité d'y soumettre les problèmes
auxquels elle est confrontée dans le cas présent et pourrait profiter de l'expérience
des autres Etats membres.
Alternatives proposées par FEBIAC
La première alternative envisagée était de demander aux utilisateurs de placer,
ou de faire placer, des flexibles temporaires sur les véhicules juste avant
le passage en station. L'opérateur du GOCA n'aurait plus eu qu'à connecter son
propre matériel.
Cette solution pose un problème aux transporteurs car ils estiment que l'exécution
du test doit être placée sous la responsabilité de l'opérateur du GOCA uniquement.
Comprenant la position des transporteurs et constatant que le GOCA n'a pas
la possibilité d'adapter son infrastructure et son organisation dans la mesure
nécessaire, FEBIAC estime qu'une autre solution serait dès lors de confier le
contrôle du système de freinage à un nombre restreint d'ateliers agréés. Le
véhicule ne pourrait circuler et être admis à l'inspection technique périodique
qu'à la condition de toujours disposer d'une attestation en cours de validité
délivrée par cet atelier.
Le système de freinage est en effet le système de sécurité le plus important.
A ce titre, un contrôle de qualité s'impose. Pour cela, et afin de garantir
le maintien de ses performances, il est primordial que les travaux qui y sont
effectués le soient par des ateliers spécialisés disposant du personnel qualifié.
Par ailleurs, il est anormal qu'à l'heure actuelle, n'importe qui puisse intervenir
sur les systèmes de freinage sans que sa responsabilité ne soit réellement engagée.
Il n'est pas normal non plus que la qualité des pièces de remplacement ne soit
pas vérifiée.
La solution des ateliers agréés aurait comme avantages :
- que le contrôle soit effectué selon les règles de l'art par des professionnels
en la matière; o d'utiliser des infrastructures déjà existantes;
- que les réparations qui s'avéreraient nécessaires soient effectuées et contrôlées
immédiatement;
- de présenter moins de contraintes pour les transporteurs puisque ce contrôle
pourrait être jumelé avec un entretien; le temps d'immobilisation du véhicule
serait donc limité;
- de ne pas occasionner de frais aux transporteurs pour l'installation de
prises de pressions complémentaires (et superflues) - en estimant le coût
d'adaptation du parc actuel de 120.000 véhicules à moteur et de 50.000 remorques
à respectivement 10.000 BEF (250 EUR) et 5.000 BEF (125 EUR) par véhicule
cela représente une opération de près de 1,5 milliard de francs (37,5 millions
d'EUR) à charge des transporteurs !
Jusqu'à présent, cette orientation est jugée impossible par l'Administration
qui invoque :
- le choix fait en Belgique de confier le contrôle technique périodique des
véhicules à des organismes indépendants;
- le manque de moyens pour agréer un nombre suffisant d'ateliers;
- le manque d'indépendance et d'objectivité que pourraient avoir des ateliers
'commerciaux' qui seraient influencés par leurs clients.
A cela nous pouvons répondre :
- qu'il y a d'autres sujets (tachygraphe, limiteur de vitesse) pour lesquels
l'Administration a dérogé par le passé pour accorder un pouvoir de contrôle
à des ateliers agréés;
- qu'aucune structure n'est à l'abri d'employés peu scrupuleux, l'actualité
récente n'a-t-elle pas révélé des problèmes de cet ordre parmi le personnel
d'une station de contrôle technique;
- que des contrôles réguliers doivent être opérés pour garantir l'efficacité
d'une procédure;
- qu'un agrément n'est jamais définitif et qu'il peut être retiré si des malversations
sont constatées.
En conclusion :
FEBIAC plaide pour que l'Administration fixe rapidement les modalités d'application
de ce contrôle pour qu'il puisse entrer en vigueur dans un délai proche. Le
compromis qui sera retenu devra en tous les cas tenir compte du fait que les
constructeurs n'accepteront en aucune manière que les véhicules subissent des
transformations de par le placement de prises de pression complémentaires.